Scolarisation des enfants sans papiers – Le nouveau guide du ministère est décrié
Photo : Jacques Nadeau – Le Devoir
Un code permanent, qui permet l’exemption des droits de scolarité, peut désormais être demandé par un enfant qui ne présente qu’un extrait de naissance et une preuve de résidence.
«Incorrect», «insultant» et «condescendant». Le Collectif éducation sans frontières n’y va pas de main morte pour critiquer les nouvelles mesures de Québec pour faciliter l’inscription à l’école des enfants à statut précaire (sans papiers ou en attente d’un statut). Selon l’organisme, les modifications administratives du ministère de l’Éducation, contenues dans un nouveau guide actuellement distribué aux commissions scolaires, ne vont pas assez loin. Et arrivent trop tard.
« Il y a des avancées, mais le résultat n’est pas à la hauteur, on se moque des gens. C’est insultant », lance Anne Buisson, l’une des porte-parole du Collectif, qui oeuvre auprès des familles immigrantes et réfugiées. « Les mesures ne sont pas bien publicisées. On est à J-10 de la rentrée et j’ai des familles qui m’appellent pour savoir si elles peuvent inscrire leurs enfants. »
En gros, le guide publié par le ministère, qui ne remplace pas les lois et règlements existants, incite les commissions scolaires à se montrer tolérantes à l’endroit des familles qui veulent inscrire leurs enfants à l’école et qui n’ont pas de dossiers complets à présenter. Un code permanent, qui permet l’exemption des droits de scolarité, peut désormais être demandé par un enfant qui ne présente qu’un extrait de naissance et une preuve de résidence. Mais les familles devront néanmoins fournir obligatoirement un dossier complet pour ne pas payer les frais, qui varient entre 5000 et 6000 $, selon le Collectif.
En outre, on inclut désormais dans les catégories d’enfants exemptés de frais de scolarité ceux dont les parents ont un permis temporaire d’étude ou de travail expiré depuis moins d’un an, notamment.
Enfin, on incite les commissions scolaires à établir un climat de confiance avec les parents et à leur préciser qu’il existe des règles strictes de confidentialité.
Précarité et discrimination
Pour le Collectif éducation sans frontières, ces nouvelles règles ministérielles ne permettent pas d’atteindre l’objectif qui est d’« éduquer gratuitement tous les enfants, sans égard à leur catégorie ou statut », rappelle Anne Buisson. S’il est bien qu’on donne un code permanent à un enfant dont le parent a un permis de séjour expiré depuis moins d’un an, qu’en est-il de celui dont le parent est sans permis depuis plus d’un an ? « On va pénaliser ceux qui sont sur le territoire depuis plus longtemps et dont la précarité est accrue », déplore-t-elle, jugeant cette manoeuvre discriminatoire.
Anne Buisson dénonce également le fait qu’on exige des familles qu’elles régularisent leur situation pour bénéficier d’une exemption de droits de scolarité. « On veut bien les scolariser, mais il faut que les familles prouvent leur bonne foi. On leur met encore de la pression », constate-t-elle.
Les commissions scolaires de Montréal (CSDM) et Marguerite-Bourgeoys (CSMB) ont confié au Devoir qu’elles mettaient déjà en oeuvre ces pratiques de tolérance, soulignant que peu d’élèves sont dans ces situations précaires.